Une vieille femme embauche un homme comme berger jusqu'à l'apparition de l’oiseau dikou. Mais le berger, connu pour ses fourberies, ne l'entend pas de cette oreille...
Aicha Ait Berri
Le teigneuxIl était une fois un homme appelé « Harmajjoud », « le teigneux rusé », connu pour sa malice et ses fourberies. Un jour, une vieille femme l’engagea comme berger. Le contrat de travail devait expirer à la fin du mois de mars, période à laquelle l’oiseau « dikou » envahit l’espace de ses cris, pique et excite les bovins.
Harmajjoud n’hésita pas à abuser de la confiance de sa maîtresse. Il avait vendu toutes les vaches après leur avoir coupé la queue. Ensuite, il repéra un terrain marécageux et y planta les queues. Et puis il courut retrouver la vieille. Haletant, il lui dit :
– C’est horrible ! Oh là là ! Quelle catastrophe Madame ! Si tu savais…
– Raconte ! Au nom de Dieu !
– C’est horrible, toutes les vaches se sont aventurées dans un terrain marécageux ; elles se sont enfoncées dans la boue, il n’y a plus que les queues qui sont visibles. Viens voir, c’est vraiment incroyable !
La vieille se lamenta sur son sort et celui de ses vaches. Au bout d’un moment, elle se résigna et se dit : « ce qui devait arriver arrive, on n’y peut rien ».
Une fois l’argent de la vente des bovins dépensé, il s’attaqua aux autres têtes de bétail. La vieille femme n’avait pas besoin de compter pour s’apercevoir que le nombre de ses bêtes était en diminution. Elle se voyait impotente et complètement ruinée ! C’est ainsi qu’elle réfléchit à une ruse qui la débarrasserait de ce filou. Elle était pressée de le congédier mais le contrat était clair : elle devait attendre la fin du mois de mars. Dans l’espoir de faire croire à son berger que le contrat était arrivé à terme, elle grimpa sur un arbre et pendant un long moment elle s’évertua à imiter le cri de l’oiseau qui annonce le printemps : « dicoo, dicoo, dicoo… ! ».
Le berger tendit l’oreille et repéra le lieu d’où venait le cri. Il resta sceptique.
– Comme il est étrange le cri de ce volatile ! Son cri s’apparente à celui du hibou !
Pour tirer l’affaire au clair, il ramassa une pierre, la plaça dans sa fronde qu’il fit tournoyer avant de viser l’arbre. Il s’en suivit un fracas et un gémissement terrifiant. Au même instant, une masse se détacha de l’arbre et s’écrasa au sol dans un bruit mat. Il se mit à sauter en se répétant ce dicton : « le hibou qui ne s’est pas envolé n’en est pas un ».